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Les Contes d'ETK Onilatki
16 juillet 2007

Goinfrerie et picolage ou comment un ogre a raté son repas

Comment la précipitation et la picole (eh oui, encore elle !) peuvent avoir des conséquences désastreuses.

Se tromper de bouffe…C’est idiot, pas vrai ? Eh bien, c’est ce qui est arrivé à un certain ogre, qu’un petit gamin appétissant et rusé surnommé le Petit Poucet a rencontré.

Un ogre rentrait chez lui, le soir. Le vent et les loups hurlaient dans la nuit noire. La femme de l’ogre avait rempli le garde-manger de sept enfants perdus dans les bois. Elle n’aime pas trop cuisiner ce genre de nourriture, car entre son mari et leurs sept filles toutes plus voraces les unes que les autres, il ne reste pour elle que des os à rogner (il n’y a jamais assez de viande ! C’est pas juste !). Quand les gamins ont frappé à sa porte, elle a bien tenté de les faire partir, espérant qu’une nourriture plus abondante viendrait. Elle leur a dit qu’ils se jetaient tout droit dans la gueule de l’ogre, mais comme ils ont répondu qu’ils préféraient cela à la gueule du loup, elle les a fait entrer. Elle leur a donné à manger (il faut toujours bien traiter la nourriture, pour qu’elle soit meilleure), et l’ogre est arrivé.

 « Wouah ! ça sent la chair fraîche ! De la chair fraîche ! Bien fraîche, même (pas grand chose à se mettre sous la dent, mais bon, comme grignotis ou en dessert, ça fera l’affaire !). Et, oh, comme il est craquant, le plus petit ! Il faudra le manger en dernier, il doit avoir un goût incomparable ! Vite, j’en veux, j’en veux, j’en veux ! »

« Eh, calmos, dugenou ! rétorque sa femme. Je viens à peine de les nourrir, ils sont encore trop maigres pour être préparés. Et une bonne nuit de sommeil attendrira leur viande. Et les filles dorment. On ne va quand même pas manger sans elles de la nourriture aussi exceptionnelle, non ? »

L’ogre réfléchit, et reconnaît que sa femme a raison. Il avale trois ou quatre outres de vinasse pure (elle doit titrer dans les 45°), et s’endort sur la table.

De son côté, le Petit Poucet, qui a été emmené dans une grande chambre avec ses frères, passe à côté de la chambre des filles de l’ogre. « Wouah ! Elles dorment avec des couronnes en or ! De l’or… S’il en ramenait à ses parents, ils ne seraient plus jamais obligés de les perdre pour pouvoir vivre… Il se glisse dans la chambre des filles, vole les couronnes, et les ramène dans la chambre où dorment ses frères. Il ne les réveille pas pour leur dire ; il veut leur faire la surprise le lendemain matin. Avec de la chance, l’ogre serait parti chasser, les filles dormiraient encore, et la femme de l’ogre les laisserait repartir, espérant toujours une nourriture plus conséquente… Au pire, ils mourraient riches… Il met une couronne sur la tête de chacun des ses frères et de lui-même, puis se couche sans bruit.

Au milieu de la nuit, l’ogre se réveille. Il se lève de sa chaise, mais titube car il n’a pas fini de cuver. On peut même dire qu’il en tient une sacrée couche ! Il marmonne : « nourriture… bonne nourriture… petits enfants… ils seraient bien mieux au chaud dans mon estomac… oh, et puis zut ! Je me les mange tout de suite, tant pis ! Où est mon couteau ? Non, pas celui-là, l’autre… Aaah, elle m’énerve, de tout ranger, on retrouve rien ! Ah, ça y est ! Voilà… Alors, où sont les escaliers ? »

Avec beaucoup de difficultés, il gravit les marches, et se retrouve là où se tiennent les quatre chambres de la maison (une pour sa femme et lui, une pour les filles, une pour d’éventuels amis, une pour la bouffe)… « Bah pourquoi y’en a huit, des pièces aujourd’hui ? Déjà qu’il y avait deux escaliers tout à l’heure… Bon, ça doit être celle-ci… Ah, non, il y a des couronnes, c’est la chambre des gamines… Celle-ci… Ah, ouais, celle-ci… Ben, la bouffe s’est multipliée, il y a quatorze tête… Bon, j’y vais… Un, Deux, Trois, Quatre, Cinq, Six, Sept, Huit, Neuf, Dix, Onze, Douze, Treize, et Quatorze ! Voilà ! Aaaaaaaahhh, j’ai envie de dormir, maintenant ! Pfff… Bon, j’y vais, les mangerai au petit-déjeuner. »

Et l’ogre part se coucher, tellement bourré qu’il s’endort à côté du lit.

Le lendemain matin, le Petit Poucet réveille se frères, qui découvrent les couronnes en or. Vite, il faut se dépêcher de sortir de cette maison, il ne faudrait pas qu’on s’aperçoive du larcin ! Ils se glissent sans bruit jusqu’à la porte, se faufilent dehors, et s’enfuient en courant en direction d’un grand chêne.

L’ogre se réveille. Il regarde partout autour de lui, hébété, et ses yeux finissent par faire la mise au point sur sa femme qui le toise, les mains à la taille, l’air soupçonneux.

« Qu’est-ce que tu fais par terre, ton couteau à la main et des plumes d’oreiller partout ? »

L’ogre a mal au crâne… Il avoue sa gourmandise, penaud, à sa femme, quand ses filles arrivent, affolées. « On nous a attaquées cette nuit ! Quelqu’un à donné plein de coups de couteaux dans nos oreillers, a piqué nos couronnes, et a laissé la porte ouverte ! C’est une honte ! Vite, fais quelque chose ! Nos couronnes ! Vite !

Aussitôt, la femme se précipite dans la chambre des gamins : rien ! Pas de doute, ce sont eux qui ont volé les couronnes (même si elle sait qui, en revanche, a « attaqué » les filles). Il faut les rattraper !

« Mes bottes de sept lieues ! » hurle l’ogre.

Il les chausse, et bondit à la recherche des gamins, humant l’air pour sentir l’odeur de la chair fraîche… Il a repéré une piste, et s’élance. Les enfants courent toujours, mais sont essoufflés. Et ils voient l’ogre faire des bonds au-dessus des arbres… Encore une fois, le Petit Poucet sauve ses frères en leur indiquant une cachette… Il était temps, car l’ogre arrive juste au moment ou le Petit Poucet finit de dissimuler le bout de son nez.

« Pfff ! Elles sont fatigantes, ces bottes, dès le matin ! Je vais roupiller un peu, et je les rattraperai plus tard. Je sens que je ne suis plus très loin ! »

Il enlève ses bottes, remue ses orteils, s’allonge, et ne tarde pas à ronfler. Le Petit Poucet sort prudemment de sa cachette, s’empare des bottes, et retourne auprès de ses frères. Si seulement les bottes étaient à sa taille, il pourrait les mettre, retrouver le chemin, et sauver sa vie ainsi que celle de ses frères… Il en chausse une, comme ça, pour rire. Et voilà que la botte rétrécit, pour s’ajuster parfaitement à son pied ! Il met aussitôt l’autre, et s’élance. Wouah, c’est beau, mais c’est haut ! Et la maison ! Il la voit ! Il sait par où passer ! Il guide ses frères à travers la forêt, comme la fois où il avait semé ses petits cailloux (les miettes de pains n’étaient pas une bonne idée, puisque les oiseaux les avaient mangées et qu’ils avaient atterri chez l’ogre !).

Les parents n’en reviennent pas quand ils les voient revenir, tous sains et sauf, avec de l’or sur la tête. Plus jamais ils ne seront dans le besoin, plus jamais ils n’auraient à perdre leurs enfants pour vivre !

Quant à l’ogre, il rentre, tout honteux, bredouille.

« Tout cela ne serait pas arrivé si tu ne t’étais pas saoulé, espèce d’ivrogne ! » lui dit sa femme. Les couronnes des gamines, tes bottes, … Bon, ces gamins étaient vraiment pas gros, on n’auraient rien eu à béqueter… Mais ils étaient mignons, on aurait pu les marier à nos filles… Il faut vraiment que tu fasses quelque chose ! »

Et, aussi étrange que ça puisse paraître, surtout pour un ogre, il a complètement changé son régime alimentaire : il est devenu végétarien (on raconte même qu’il milite pour la culture bio), et ne boit plus que de l’eau minérale dénitratisée.

Et tout cela parce qu’il n’a pas voulu attendre, alors qu’il avait la nourriture à portée de main, et qu’il avait trop bu… Goinfrerie et picolage, quelles plaies ! A bientôt.

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